Les nuits agitées sont difficiles à vivre pour l’entourage et le patient. Il importe de replacer le problème de l’agitation nocturne dans le contexte d’une maladie pleine de paradoxes et de phénomènes aléatoires. Pendant la nuit, un patient Alzheimer peut être plus « réveillé » que le jour et il s’agite ne sachant pas quoi faire.
Les répercutions de la fatigue
Si on suit la courbe de la fatigue du patient dans la journée, on le verra somnoler dès que son attention n’est plus sollicitée. Quand il s’endort le soir, il récupère un peu d’énergie et se réveille après quelques heures de sommeil. Ne sentant plus sa fatigue il peut être tenté de se lever et de vouloir s’habiller et sortir. Il déambule s’il n’a pas d’autre choix, d’autant que tout est calme autour de lui. Le jour, toutes les activités dont il n’est pas le centre ou auxquelles il ne participe pas, le dérangent, car il n’arrive pas à suivre, ni à comprendre ce qui se passe. S’il s’agite la nuit il sera d’autant plus fatigué et ensommeillé le jour.
Un patient Alzheimer n’est pas seulement quelqu’un qui a perdu la mémoire. Toutes les activités de son cerveau sont affectées par le déficit de neurones et en premier lieu sa perception du monde. Arriver à rétablir un lien avec un environnement même simplifié, même aménagé, même dépourvu de stress, lui demande un effort constant et provoque une fatigue certaine.
L’effet nocif des calmants
Les calmants et les somnifères rendent l’esprit brumeux et obscurcissent le cerveau d’une personne en bonne santé, et sur le patient Alzheimer ils aggravent les symptômes. Ponctuellement, ils peuvent rendre service quand l’aidant est à court d’idée. A long terme, ils n’aident ni le patient, ni son entourage. Il vaudrait mieux s’en passer définitivement, si on veut protéger la clarté d’esprit qui demeure et permet des échanges satisfaisant pour les deux parties. Un patient agité n’a pas besoin de calmant, il a besoin qu’on répare son ego, et ensuite peut être d’autres choses. (cf Qui êtes vous, je ne vous connais pas !)
Lorsqu’on a été réveillé en pleine nuit, un laps de temps plus ou moins long est nécessaire pour reprendre ses esprits. Le patient cherche quotidiennement à se resituer mais il n’arrive pas à achever le processus, faute de neurones en nombre suffisant. Il reste dans un entre-deux, où il lui faut bien survivre. Si on l’assomme avec des calmants, on ne l’aide pas à retrouver les esprits qui lui reste.
Le paradoxe du café
Après une expérimentation de plus de deux mois, il semble bien que deux cafés par jour, un le matin et un après déjeuner, ont un effet apaisant et permettent progressivement de meilleures nuits.
Comme pour tout un chacun la qualité de la nuit dépend de la qualité de la journée. Une nuit satisfaisante suit aisément une journée satisfaisante. Si la journée se passe mal il n’y pas de raison pour que la nuit se passe bien. Le café peut faciliter une journée plus éveillée et permettre éventuellement d’instaurer un meilleur équilibre nuit-jour.
Prendre du café le jour permet éventuellement de mieux vivre la journée et donc de mieux dormir la nuit. Un café plutôt qu’un calmant, pourrait être une nouvelle manière de gérer la vie quotidienne.
Accompagner un malade Alzheimer demande beaucoup de réactivité. Il faut sans cesse naviguer entre les écueils, éviter les récifs, en dresser la carte, aménager, anticiper, réparer l’ego blessé, ruser, inventer, faire feu de tout bois (cf les approches non médicamenteuses) et essayer de vivre des nuits sans agitation.
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Merci pour l’astuce du café je vais l’essayer avec ma mère ki se comporte exactement comme vous le décrivez plus haut.
Bonjour,
Je suis effectivement assez étonné que le café puisse avoir un effet apaisant pour passer de bonnes nuits. Cette remarque est néanmoins à relativiser car il faut en consommer avec modération.
Oui, c’est paradoxal, mais cela s’explique. un cerveau alzheimer, fatigué par les efforts que demande la vie quotidienne même simplifiée trouve dans le café un stimulant qui lui permet de passer de meilleures journées et donc de meilleures nuits. C’est à un stade avancé que l’effet est bénéfique.
Merci pour ce conseil que je vais transmettre à une personne de mon groupe de parole. Son mari marche toute la journée et les nuits sont agitées. La seule réponse du neurologue a été d’augmenter la dose de calmant!!!
j’ai consulté le docteur Drunat avant de vous répondre sur les calmants: »Pour les « calmants », la première des questions c’est pourquoi a-ton prescrit ce type de médicament et depuis quand ? Puis pourquoi veut-on l’arrêter ?
Si le constat est que le patient est trop calmé, il faut proposer un arrêt progressif.
L’idée du café est de contrebalancer l’effet du calmant (compétition au niveau des récepteurs cérébraux) (remarque: en psychiatrie, spontanément les patients fument et consomment du café pour lutter contre le ralentissement occasionné par les neuroleptiques).
Dans le cas de maladie cérébrale organique, si l’indication n’est plus ou si le but est dépassé, autant stopper le médicament.Un autre conseil astucieux est de faire dès le réveil rentrer un maximum de lumière dans la chambre. Celle-ci stoppe la sécrétion de mélatonine et cela imprime un rythme au cycle veille-sommeil.