Vivre sans espoir de bonheur, aucun être humain n’en voudrait pour lui-même. Pour les autres, certains se montrent souvent plus tolérants et s’habituent à des situations malheureuses ou désespérantes qu’ils finissent par trouver banales ou insignifiantes, simplement parce qu’elles se répètent, jour après jour.
Le personnes alzheimer du fait de leur maladie sont souvent reléguées dans un un no man’s où l’idée même de bonheur parait stupide et incongrue: Le bonheur pour eux? Vous voulez rire! Vous vous moquez de nous qui souffrons à cause de ces malades impossibles à supporter, qui nous pourrissent la vie!
Pourtant, les patients alzheimer aussi ont droit au bonheur, parce qu’ils sont des humains à part entière, bien que certains soient prêts à leur renier cette qualité, juste pour ne pas avoir à les prendre en charge, quand ils deviennent dépendants: « il n’est plus lui-même, je ne le reconnais plus. »
Le bonheur, un droit?
Le droit au bonheur n’est inscrit ni sur les portes des prisons, ni sur celles des hôpitaux. Avoir commis un crime ou tomber malade, surtout de la pire des maladies, celle qui effraye tout un chacun par ses aberrations, relève dans notre société de la même punition: « Au delà de cette limite le bonheur est interdit. » Quelqu’un qui ne connait pas la date du jour, quelqu’un « qui perd son identité » comment pourrait-il espérer un bonheur quelconque? Non, le bonheur est réservé aux gens qui ont leur agenda à jour et leurs capacités cognitives intactes!
Quand le docteur Drunat nous a demandé de faire une témoignage en 2009 à Bretonneau Daniel a choisi comme titre de son intervention: « Peut on vivre heureux avec Alzheimer?« (cf: Bien vivre avec la maladie d’Alzheimer, c’est possible !) L’accolage de ces deux mots « Bonheur » et « Alzheimer » est apparu à beaucoup comme un insulte à la souffrance des aidants et des malades, comme un scandale, une monstruosité. Ceux qui ont eu la chance d’entendre Daniel parler et communiquer son état de patient heureux ont changé d’avis. Je ne fais rien d ‘autre que de porter son message depuis lors.
De la bonne humeur au bonheur
C’est pourquoi j’insiste tellement sur l’importance de la bonne humeur (cf: A prescrire dans tous les cas: de la bonne humeur!) De la bonne humeur au bonheur il n’y a qu’un pas. Comment trouver et retrouver chaque matin le sourire? Dès que quelque chose ne va pas ou ne va plus, il faut inventer autre chose, car rien ne s’arrange de lui-même avec le temps, et dans le cas qui nous occupe tout empire régulièrement avec le temps. Dès qu’un nuage apparaît à l’horizon, vite chassons-le sans pitié et ne laissons pas cette journée ou ce moment se gâter sous un vilain orage. Si j’aime mon jardin, vais-je laisser les mauvaises herbes l’envahir ou les fleurs se dessécher? Si j’aime ma maison ne vais-je pas l’entretenir et la décorer? Et commencer par réparer ce qui est cassé?
Le bonheur, une idée neuve.
Aux yeux du public, le droit au bonheur des personnes alzheimer a été enterré sous le mur épais des lamentations des aidants (le parcours du combattant, la descente aux enfers) et sous les certitudes pesantes du corps médical (apraxie, aphasie, agnosie) cependant un courant se dessine, encore bien timide, qui libère l’idée d’un bonheur pour les patients alzheimer.
Je me réjouis de lire dans le livre écrit par Linda Benatar et Patrick Lemoine, « La vie Alzheimer » Pocket novembre 2014- Armand Colin 2009: « La meilleure manière de rendre harmonieux un patient qui a cette maladie, c’est de rendre harmonieux son entourage. Si moi aidant, je suis heureux, celui que j’aide sera heureux. » Ils ajoutent plus loin: « Le carpe diem du philosophe, cueillir le jour présent, profiter de l’instant, n’est possible que si le passé et le futur sont abolis. » Autrement dit les patients alzheimer auraient un accès particulier au bonheur, du fait que, faute de mémoire, ils vivent dans le présent!
Je recommande le livre du docteur Steven R.Sabat, traduit par Damien Hugonnard, « Le vécu du malade d’alzheimer« (éditions Chronique sociale mai 2015) qui démontre comment la manière même de diagnostiquer Alzheimer en évaluant séparément les fonctions cognitives aggrave le handicap. Les personnes se trouvent « scientifiquement dégradées », ce qui les fait souffrir dans leur dignité et dans leur quotidien, car personne ne cherche à les comprendre. Or, dans la vie toutes les fonctions cognitives s’utilisent en même temps, elles se conjuguent, se répondent et se compensent les unes les autres, ce qui explique pourquoi à un stade avancé les malades sont capables d’humour, d’empathie et de perspicacité. Humour empathie et perspicacité, ce sont des capacités qui invitent au bonheur.
Le Docteur Croisille « Alzheimer: que savoir? que craindre? qu’espérer? » (Odile Jacob septembre 2014) consacre un chapitre à « L’humour incroyable des patients alzheimer ». Il écrit: « Il est capital que le public et les familles aient une idée positive des patients, qu’ils leur reconnaissent la possibilité d’avoir une vie porteuse de sens et d’émotion. » Un pas de plus et le mot tabou était enfin lâché:… une vie et du bonheur!
bpvtll
Bonjour je. M appel Anne mon mari est diagnostiqué démence vasculaire mixte est ce que vous connaissez cette maladie qui s apparente à Alzheimer’s cette arrivé d un coup le 4decembre2016 et depuis c est la degraingolade
Toutes les maladies qui atteignent le cerveau bouleversent la vie du malade et de l’entourage. Il faut éviter le plus possible de stresser le malade qui est déjà stresse par sa maladie. La prise en compte de ses besoins, la bienveillance et le calme facilitent la vie quotidienne de tout le monde. Si les choses deviennent trop compliquées il faut trouver de l’aide ou des aides.
Merci pour votre dévouement,quand je lis votre blog,,je reprends le chemin de l’optimisme et je prends du recul , en relativisant , par rapport à la maladie apparentée alzheimer de mon mari qui est âgé de 85 ans et diagnostigué depuis 3 ans.Traitement par Ebixa depuis 1an.Vous savez nous donner du courage.
Merci pour ce blog, je lis et relis vos messages, je suis aide soignante dans une unité de vie protégée (alzheimer )…vous m aidez à comprendre et à agir au mieux pour ces personnes qui ont besoin de nous tous et toutes….ghyslaine
Que ce blog m’est précieux ! Je lis et relis vos commentaires et les conseils d’Anne, qui rejoignent tout à fait mon expérience avec mon mari – notamment un séjour à l’hôpital très pénible ! Merci à vous toutes pour cet éclairage sur la confusionnite : je me suis toujours insurgée contre la démence et son traitement… Jacques est diagnostique depuis 7 ans et grâce à ce blog, je reprends gout a la vie : merci à ce partage d’échanges, merci, merci à vous toutes et surtout à Anne !
Mon mari, 58 ans est diagnostiqué depuis un an. Il dit à qui veut l’entendre qu’il est heureux et qu’il se sent libre. Libre de son temps, libre d’aller vers les autres, libre d’oser faire des choses qu’il n’aurait pas oser faire avant.Une de ses plus grandes joies, chaparder des roses dans les jardins pour me les offrir. Il dit qu’il a une maladie de la mémoire mais à aucun moment il ne dit qu’il est malade car il ne se sent pas malade. Nous avons décidé de profiter de chaque moment sans nous projeter dans l’avenir. Mon mari a toujours été décalé et original, aujourd’hui il l’est encore davantage et cela lui donne encore plus de charme. Je n’ idéalise pas la situation, il y a des moments plus difficiles à gérer que d’autres et il y aura probablement des jours plus compliqués mais nous essayons de vivre heureux ici et maintenant. C’est le regard des autres, le silence d’anciens amis qui créent la souffrance. Quand je doute, quand je suis fatiguée je lis et relis les articles et les commentaires de ce blog qui me ressource et m’apaise.
Merci Colette
Bonjour Sylviane. Comme vous mon mari et moi nous avons 59 ans et après quelques années de recherche nous avons le diagnostique depuis bientôt 2 ans. Mon mari ayant perdu un travail qui le passionnait et n’étant pas préparé à une retraite anticipée a perdu presque tous les contacts sociaux , il est souvent triste et désœuvré . Comme vous le dites c’est le silence des anciens « amis » qui est lourd. De même pour nos enfants et beaux enfants qui toujours pressés ne prennent plus le temps de parler avec lui! Actuellement je lis le livre de Colette R , comme vous j’y trouve une philosophie de la bienveillance et de la joie du moment présent. Ce qui me fait peur par rapport à l’avenir c’est d’être de plus en plus seule! Être celle sur qui mon mari compte exclusivement et devoir organiser ma vie en fonction de l’évolution de sa maladie! A presque 60 ans , me voilà parachutée dans le monde de la vieillesse, de la lenteur, … Alors que je me sens moi encore jeune et pleine de projets !
Qu’en est il pour vous même Sylviane? Avez vous des enfants? Comment réagissent ils? Sur qui pouvez vous compter …
Je vous souhaite une belle journée!
Bientôt une nouvelle année commence … Je vous souhaite de prendre chaque jour avec tout l’amour possible et beaucoup de bienveillance comme nous l’indique Colette R
Amitiés
Anne
Bonjour Anne. Je prends seulement connaissance de la reponse que vous avez faite à ma lettre. Il s’est passé de nombreux mois et de nombreux événements. La maladie de mon mari évolue et j’ai pu prendre ma retraite un peu plus tôt que prévu pour etre davantage présente et disponible. J’avoue que je crains un peu de me trouver enfermée dans ce duo complice et fusionnel que nous formons. Je cherche des contacts . Votre lettre m’a touchée, je sens que nos situations présentent des points communs et en tout premier lieu, notre âge ! J’ai deux filles , deux gendres et un petit fils. Je trouve beaucoup de soutien auprès de mes enfants mais ils ne vivent pas dans la même région que nous. Peut-être lirez vous cette reponse que je regrette de vous faire si tardivement . Bien amicalement
Sylviane
Merci Colette pour ces moments de réconfort qui décrivent si bien ce que je ressens.
mon mari est diagnostiqué depuis trois ans et je peux témoigner que le bonheur existe. Il ne peut être un but à atteindre mais s’invite quand on sait rester dans l’instant présent.
Continuez à nous donner courage et force de vie.
Hélène
Texte superbe. Merci Colette et Daniel
Comme vous avez raison. Mon mari quand il est bien a développé un certain humour sur lui même et sur les erreurs qu’induisent parfois sa maladie. Quel bonheur quand on eclate de rire tous les deux ,lui qui a été sérieux toute sa vie de par son éducation. Merci de nous indiqur des livres réconfortants on devrait en faire cadeau aux neurologues eux qui s’offusquent que leurs patients ne connaissent pas la date du jour