Pour comprendre et faire face à Alzheimer, il faut commencer par le b.a.ba, c’est à dire les fondamentaux. Alors le reste de l’alphabet ne posera pas de problème . Si on n’a pas compris le b.a.ba, on reste stupide ou « sidéré » devant une maladie mystérieuse et incompréhensible, car on n’a pas appris à pas la lire.
Le A : Alzheimer, une maladie de la gestion de l’information. Au fur et à mesure que le déficit d’information augmente, la perception du monde se transforme. Un accompagnement intelligent fait et refait le lien entre le malade et son environnement, une sorte d’interface simple au début, de plus en plus sophistiquée par la suite.
Le B: Un malade alzheimer se sent comme quelqu’un qui aurait pris des somnifères et des neuroleptiques en quantité excessive. La confusion mentale n’augmente pas systématiquement, il y a des hauts et des bas, des domaines réservés, des segments de mémoire qu’on peut faire jouer, des capacités d’apprentissage. Un bon café ne lui fera pas de mal, un somnifère ou un neuroleptique si. Le sport fera du bien, l’inactivité non. Question de bon sens. Une critique sera insupportable, un compliment bienvenu.
Le BA: Le patient Alzheimer fait confiance aux informations que son cerveau lui donne. Il faut tenir compte de ce fait pour entrer en contact avec lui, toujours proposer, jamais imposer. Toujours inventer de nouveaux ponts entre la réalité et l’image qu’il en perçoit. S’il voit son reflet dans un miroir et ne se reconnait pas, il faut ôter le miroir ou le voiler, pour éviter qu’il se trouve en situation d’échec, car l’image à la quelle il parle ne peut pas lui répondre. Lui ne le sait pas, le lui expliquer est contre productif, car il se sentira incompris, rejeté et pire encore méprisé.
Mais pour trouver la meilleure adaptation à l’environnement particulier de la personne concernée, l’empathie est nécessaire. Elle seule permet de doser l’action et la parole, de trouver le rythme et les nuances qui rendront la personne confortable, paisible, heureuse.
Les bonnes âmes, dépourvues d’empathie, donnent ou prescrivent à dose massive des « calmants » juste pour se procurer un confort de quelques heures sans se préoccuper des conséquences sur la vie entière du patient (cf un week-end à l’hôpital). elle démontrent ainsi qu’elles sont des analphabètes de la maladie d’Alzheimer.
Dans un livre qui vient de paraître, un médecin, gériatre de surcroît, raconte qu’il avait l’habitude de prévenir la famille: « Un jour viendra où il ne vous reconnaîtra pas! » quand il posait un diagnostic d’Alzheimer. Un jour il va voir sa mère, malade Alzheimer, qui vient d’être « placée ». Elle lui dit: » Bonjour Monsieur ». Il reste sidéré! Il n’a pas l’idée de lui répondre avec le sourire: « Bonjour Madame, je suis heureux de vous voir… » ni de s’enquérir de l’état de confort de cette personne, qui a été sa mère, de voir si elle a besoin de quelque chose de précis pour se sentir mieux. Non, il reste « sidéré » et ne va pas la revoir de six mois! Il faut dire que ce médecin tient en grande estime Jean Maisondieu, ce grand analphabète (cf un livre noir sur Alzheimer) Quand au bout de six mois il va la revoir, elle l’accueille avec un grand sourire, il conclue que tout cela est « mystérieux »… Le mystère étant l’excuse préférée de l’ignorance.
Quand on apprend à lire la maladie d’Alzheimer, à la décoder, on constate sa dimension aléatoire et l’importance du moment présent. (cf le début des ennuis ou la fin de l’ennui) Au fur et à mesure que le déficit d’informations augmente, la vie quotidienne se peuple de passages difficiles (cf les passages difficiles). Le patient Alzheimer devient hermétique au raisonnement. Il se concentre sur ses sensations corporelles et affectives, de façon à survivre dans un monde qui se délite. Des activités simples provoquent une sorte de fatigue neuronale. Le patient refuse le soin qui chatouille désagréablement ses sensations physiques, avant qu’il ne se mette à chanter sous la douche (cf le secret d’un toilette réussie). Une fois la toilette terminée, il est heureux et dit merci. Il peut refuser obstinément de se recoucher et se mettre à ronfler dès qu’il a la tête sur l’oreiller. Le non peut se transformer en oui en un éclair. Si on a bien compris le b.a.ba d’Alzheimer, tout ce qui parait compliqué et « mystérieux » devient facile et même amusant. C’est un peu comme un jeu de piste.
Crédit photo: Fotolia: © Blue Moon
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Début avril nous avons suspendu le traitement pour cause de troubles intestinaux. Je suis très inquiète car depuis quelques jours mon mari n’arrive plus à formuler des phrases correctes! Il est continuellement fatigué et déprimé ce qui n’était pas le cas au mois de mars … Est ce une nouvelle étape ou un passage difficile? Merci . Bonne journée à vous
Ping : Les bienfaits de la lenteur | Labortho
Quand la maladie est avancée, le raisonnement est contre-productif, par exemple: « Il faut prendre la douche ensuite tu t’habilleras et tu pourras sortir. »
Le malade entend qu’on veut le forcer, il se sent impuissant à répondre au raisonnement, ce qui entr’ouvre la porte de l’agressivité. Il est facile de lire sa contrariété sur son visage et sur son corps. Il faut se montrer rapide pour sortir d’un tel blocage. Les réactions du patient au comportement de l’aidant sont instantanées, elles peuvent surprendre par leur rapidité. La lenteur ne va pas tout résoudre.
C’est plus un rythme, presque un rythme respiratoire, dans lequel il faut se mettre pour réintroduire l’harmonie envolée. Un rythme porteur de calme et d’apaisement. Oui, tout est bien. Oui, tout va bien.
Mon mari a 58 ans. Il a été diagnostiqué il y a 1 an. Avant cela nous avons été balotés pendant 4 ans de burn-out en dépression . On m’a également proposé d’aller voir du côté des thérapies de couple !!!!
Si vous saviez comme je suis heureuse de découvrir ce blog! Enfin une porte ouverte pour me sentir moins seule!
Je m’inscris. Merci!!!!
votre commentaire m’a rendu heureuse, oui,le bonheur est contagieux.
Oui, merci vraiment chère Colette Roumanoff pour ce blog, pour ce partage, pour ces « cadeaux » qui me permettent de comprendre ou plutôt d’accepter ces moments qui me troublent tant alors que Maman est diagnostiquée depuis peu.
Maman a perdu son compagnon il y a 1 mois. C’était « son repère ». Depuis la situation s’est étiolée, bien sûr.
Je ne savais pas comment réagir, alors j’ai juste décidé d’écouter mon coeur en me disant : » La seule chose que je souhaite, c’est que Maman soit en sécurité, confortable, mais par-dessus tout je souhaite qu’elle soit HEUREUSE ! ».
Ne comprenant pas toujours son comportement, je me suis vue au début « l’obliger » à faire des choses « normales » (douche le matin par exemple) et je constatais que je la contrariais, que je la stressais.
Alors, j’ai observé, j’ai réfléchi,… Et, ne voyant pas d’autre solution que celle d’écouter mon coeur, j’ai accepté d’aller à son rythme, de jouer, de rire de chanter… Et, c’est incroyable, c’est fabuleux, ÇA MARCHE !!!
Maman a toujours été une personne chaleureuse, positive, aimante, rassurante, généreuse, rigolote aussi ; et tout cela toujours dans la bonne humeur et la joie.
Alors pourquoi devrions-nous devenir « trop » sérieux, régler leur vie comme nous l’entendons, sur les mêmes modèles ?
Je pense que si nous voulons aider nos proches sur ce chemin, c’est à nous de nous adapter et à nous de tout faire pour qu’ils vivent, malgré tout, heureux.
Ce n’est pas de l’abandon, c’est de l’Amour, non ?
Oui, accepter ce qui est, ce qui vient, c’est la bonne attitude.
Accepter veut aussi dire qu’il faut continuer à vivre, être actif même dans le silence ou l’immobilité. Il s’agit de prendre conscience sans à priori.
C’est parfois difficile car le mental réagit dans un sens qui va à l’encontre des effets recherchés. L’apprentissage de la patience permet d’atténuer ce handicap. Les efforts pour y parvenir sont gratifiants mais si la tension persiste en nous, le malade le ressent et nous sommes à la peine.
Oui, accepter les échecs cela permet de réfléchir à une meilleure attitude, au recul nécessaire éviter l’incompréhension ou le rejet.
Oui, bien sur toutes sortes de situations nouvelles nous enseigne la valeur de la patience et de l’activité passive: être là sans forcément réagir immédiatement à ce qui se passe, attendre de trouver puis tester une réponse, voir si elle satisfait les deux parties, si non essayer encore autre chose.
Je pensais maîtriser un peu le b a b a. J’avais suivi les ateliers théâtre, relu en boucle ce blog mais dimanche soir quand la police m’a appelé car mon mari s’était perdu en vélo à plus d’une 1/2h en voiture de la maison, je ne maîtrisais plus rien. Sur la route du retour j’ai fait l’erreur d’utiliser les pourquoi ,les où, les comment ,les si,les tu devrais..pour retrouver de la rationalité là où il n’y en avait plus. Le lendemain il avait oublié une grande partie de sa mésaventure. Les enfants , les amis que j’avais appelé en réconfort, eux n’avaient pas oublié et me proposaient les solutions auxquelles j’avais pensé pendant ma longue nuit insomniaque :un gps spécial vélo, une montre avec puce de geolocalisation, un ipad relié à un i phone ou le contraire je ne sais plus. Que répondre? quel par feu mettre en place pour qu’il garde son autonomie et moi mon calme…depuis je ne sais plus j’ai du mal à retrouver l’usage de mon alphabet.
C’est un passage difficile: il s’est perdu pour de bon en vélo. Il a du déjà se perdre et se retrouver plusieurs fois. Il n’a probablement plus suffisamment de repères pour faire seul du vélo .
Soit vous allez avec lui, soit vous envoyez quelqu’un d’autre à votre place, soit il ne fait plus de vélo. Vous pouvez mettre en place une autre activité où il est plus facile de l’accompagner pour vous ou pour quelqu’un d’autre, car il ne doit pas être pénalisé par la suppression des sorties.
Je me suis penchée sur les gps, c’est d’utilisation complexe et ça ne répond pas à la perte de repères qui est générale. S’il s’est trompé de route, il peut aussi griller un feu rouge, prendre une rue en sens interdit etc…
C’est le moment de faire appel à toutes vos ressources pour réaménager votre vie commune. Quand une pareille chose arrive, on n’a pas envie que ça recommence. La prudence recommande de ne pas laisser à la tragédie une seconde chance. Il y a des mesures concrètes à prendre.