La macro des repères.
Le passage d’un état du cerveau ordinaire à celui d’un cerveau affecté par Alzheimer affecte la capacité à se repérer plus que la mémoire. Il est important de bien distinguer la perte de mémoire et la perte des repères. Le patient à partir d’un certain stade ne sait pas quel jour on est, ce n’est pas qu’il l’a oublié, il ne l’a jamais su, car il a perdu la notion même de calendrier, le concept global, la macro des repères du temps. Il peut réciter les jours de la semaine et les mois de l’année comme il se souviendrait d’un poème ou d’une chanson familière. Il peut les réapprendre s’il les a oublié, sans que cela lui permette de compter le temps, ni lui redonne la signification du temps qui passe, du présent qui bascule dans le passé, d’aujourd’hui qui demain deviendra hier.
Ainsi en est-il des repères d’espace. Si quelque chose le dérange il veut rentrer chez lui, alors qu’il est y est. Mais ce chez lui-là le dérange, lui parait négatif, il ne le reconnait pas. Comme il ne reconnaîtra pas quelqu’un qui lui fait, même sans le vouloir, éprouver une souffrance cérébrale. Tout se passe comme si le cerveau utilisait cette stratégie de la non reconnaissance pour sauvegarder l’activité qui lui reste. Comme si c’était une mesure d’économie d’énergie, que l’on peut rapprocher des sensations de fatigue qui nous submergent quand on a trop travaillé et qui nous poussent à éteindre l’ordinateur, à aller nous coucher avec l’impression d’une saturation intellectuelle.
L’agressivité, un signal d’alarme.
Il est facile de mettre le cerveau d’un patient en état de surmenage et de déclencher des réactions de saturation, de non reconnaissance ou d’agressivité, si on dépasse les bornes du tolérable. Un des contresens les plus terribles que l’on fait aujourd’hui c ‘est qu’on met l’agressivité sur le dos de la maladie, alors que c’est un signal d’alarme. Le cerveau « bugge » car il a été sur-stimulé. (cf: « Qui êtes vous je ne vous connais pas? »). Un stress quelconque s’est ajouté au stress quotidien engendré par la maladie. Il faut prendre des mesures urgentes pour faire descendre le niveau du stress. Et non pas faire avaler des neuroleptique qui vont diminuer les capacités d’adaptation d’un cerveau déjà bien handicapé et augmenter les problèmes à venir. Si la personne semble souffrir sans que l’on puisse savoir d’ou cela vient, quelquefois un paracetamol ramènera le confort et le sourire, le stress venait d’un mal à la tête.
Les dangers de la stimulation
Un ami de lycée a emmené Daniel faire une promenade en voiture en Provence, en lui montrant les chemins et les villages où ils étaient passé ensemble il y avait 50 ans, dans le but amical de stimuler sa mémoire et de lui rappeler les bons moments passés ensemble à découvrir la Provence de Giono. Daniel ne se rappelait rien, du moins pas à la vitesse des questions de son ami. Il ne reconnaissait pas non plus les endroits visités. Au bout d’une heure de cet exercice il a cessé de reconnaître son ami et il m’a répété pendant plusieurs semaines: « Tu te rends compte, Colette, je me suis retrouvé dans une voiture avec quelqu’un que je ne connaissais pas! » Quand il est revenu il m’a interpellé: « Colette, ce Monsieur prétend qu’il a connu mon père! » Il était scandalisé et prenait « ce Monsieur » pour un menteur! L’ami se sentait très mal. Son malaise a du aggraver celui de Daniel. C’est l’effet des neurones miroirs dont on constate l’efficacité au quotidien et plus encore dans les périodes de stress. Voilà un drame ordinaire causé par la méconnaissance de la maladie d’Alzheimer. Le cerveau fragilisé de l’un se défend, le cerveau ignorant de l’autre peut ajouter encore du drame au drame : « Quoi? tu ne me reconnais pas, c’est impossible! »
Les réponses simples et apaisantes
Dans cet univers sans repères où se meut le patient, il peut avoir des demandes qui déboussolent l’entourage, lequel s’accroche souvent désespérément aux repères dit normaux, au lieu de profiter de la poésie d’un univers sans repère de temps et de lieu. Il peut y avoir un danger à ramener de force le patient dans la réalité terre à terre. Daniel me demande de temps en temps de téléphoner à sa mère, morte depuis des années. J’ai mis du temps à trouver la bonne réponse, celle qui apaise et qui n’est pas fausse: « Je n’ai pas son numéro de téléphone… » Il n’insiste pas et nous passons à autre chose, je lui propose de lui donner des nouvelles de ses enfants ou de leur téléphoner. De temps en temps, en rentrant d’une promenade il m’appelle « maman ». Je trouve que c’est touchant car à un certain niveau de réalité, je suis aussi sa maman.
Depuis l’ami a retrouvé sa place privilégiée dans le cœur de Daniel, ils vont se promener ensemble et parlent de ce qu’ils voient dans le présent. C’est en restant dans le présent qu’on échappe aux pertes de mémoire et aux pertes de repères. C’est un cadeau que les patients Alzheimer peuvent faire à leurs proches, les ramener dans le présent.
Crédit photo: © Robert Kneschke
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La fin de vie nous concerne tous.
En Hôpital ou dans les Maisons « dites de repos » le personnel est réduit
Les personnes âgées sont complétement perdues. Constat fais pendant les 18 années de visite dans plusieurs Homes.
Les soins à domicile, proposent aussi des placements, sans prendre le temps pour trouver des solutions plus humaines.
Je m’occupe au quotidien de mon compagnon attient d’Alzheimer de puis 12 ans.
Il occupe une maisonnette à coté de la mienne, ou maman à vécu avant lui, jusqu’à ses 96 ans.
Maman est décédée en 2007, chez elle après un coma de 22 jours, les soins palliatifs à domicile.
Mon compagnon et moi à ses cotés et son médecin tous les jours y compris les jours fériés.
Nous avons 76 ans tout les deux, mon compagnon a ses points de repères dans cette petite maison, sécurisée et adaptée à son handicap,Il raffole de la musique et des danses populaires, regarde tous les reportages sportifs à la télé.
Il prends ses repas chez moi, et va d’une maison à l’autre à sa convenance.
mon compagnon n’est pas malheureux( PAS ENCORE…)
Qu’en sera t-il demain?
Jeunes et vieux, tous concernés battez vous pour une qualité de vie disparue, pour une ambition orientée vers la santé préventive. Car riche ou pauvre, nous sommes pour une fois dans le même bateau.
Nos ministres de la santé, devrait être les premiers concernés et voter des lois nouvelles en fonctions d’un constat de société qui se déshumanise. Il sont comme nous concernés et ni plus ni moins à l’abri.
La santé préventive au premier rang, l’entraide, l’écoute, la solidarité, l’amitié le respect et non pas le profit, l’argent, qui ne nous prolonge pas la vie. Les riches meurent aussi et souvent seuls, n’ayant jamais rien partagés.
La richesse se calcul sur le nombres d’années vécues, avec de petits bonheurs au quotidien sans maladies ni souffrances. Mourir entourés et s’éteindre, comme une bougie, après une vie bien remplie et partagée.
Il n’existe aucune autre richesse sur cette terre. Le parcours exceptionnel de 100 ans est si court.
Pensez y vous les jeunes, dirigés vous vers les vrais valeurs et vous comprendrez comme s’est bon de partagés. Les 30 années dites glorieuses ne sont pas une référence de vie heureuse.
Il faut tout refaire, nous les ainés nous avons confiance en cette possibilité de changement et nous le souhaitons de tout cœur avec vous.
Michel et Anne-Marie
Que c’est triste de voir notre société se déshumaniser de plus en plus. Ma mère est chez nous depuis 3 ans, elle est alzheimer, elle a 90 ans elle est bien ici. Mon mari a 75 ans et moi 70 nous avons fait une lettre demandant qu’on ne nous sépare pas si l’un d’entre nous n’est pas « bien » nous aimons tellement dormir l’un contre l’autre la nuit, cette intimité est grande et essentielle pour nous qui l’avons toujours entretenue. Je vous soutiens et prends part à votre chagrin, cependant vous avez fait ce que vous avez pu, ne vous en rendez pas malade.
Solange
L’article est paru sur le site internet de Psychologie.com, rubrique » bien-être’ sous rubrique « Alzheimer » et sur la page Facebook de ce magazine.
Bonjour Patricia, Comme tout ce que vous écrivez me touche ! Mon Papa s’en est allé mi juillet 2014, âgé de 88 ans, atteint de confusionnisme également. Il était aussi en maison de repos, et ma maman allait le voir 3 à 4 fois par semaine. Il en était encore tellement amoureux, si heureux chaque fois qu’elle venait le voir.., depuis 67 ans !! Il s’en est allé le jour de leur 67 ans de mariage. Si j’étais vous, je ne pourrais en effet pas supporter qu’on les sépare de chambre, c’est vraiment tellement important de ne pas changer TOUTES leurs habitudes ! Déjà les déménager, et en plus les séparer alors qu’ils s’aiment , ça non, non et non. C’est pire que tout pour eux. Faites vous entendre, je vous soutiens et espère que vous trouverez quelqu’un qui vous écoutera .
merci Bernadette,
Pour le moment tous les soutiens sont les bienvenus.
Un article devrait paraître dans le magazine psychologie je vous tiens tous au courant
Patricia
Bonjour,
Je m’appelle Patricia. Mon papa et ma maman ont tous les deux la maladie d’Alzheimer. Ils ont tous les deux 89 ans. Mon père a été diagnostiqué depuis au moins six ans et ma maman quelque temps plus tard. Concernant ma maman je n’ai jamais été d’accord avec le diagnostique car elle souffre effectivement parfois de perte de repère et de confusion mais quand tout va bien, elle a toute sa mémoire courte et elle est très lucide. J’ai décidé de les laisser à leur domicile contre l’avis de ma sœur Je me suis battue des six dernières années contre des montagnes, juste pour qu’ils puissent finir leurs jours ensemble, ainsi qu’ils le souhaitent . Ils s’aiment très fort et mon père calme ses angoisses en prenant la main de ma mère. Depuis deux mois,ma sœur a pris le relai pour assurer l’ensemble des contraintes qu’exige le maintien à domicile, car j’avais besoin de souffler un peu. Cela n’a pas trainé! Le rouleau compresseur des soi-disant professionnels ‘ se sont réunis pour décider de leur sort Ils quittent aujourd’hui leur appartement pour un cantou. Dans la mesure où je n’avais plus la force de continuer moi-même, je n’ai pu m’opposer à leur décision. Mais bien sur avec une condition: » qu’on ne les sépare pas » . Tout le monde a répondu » personne ne veut les séparer »! Et pourtant , ils partent aujourd’hui pour un cantou dans des chambres séparées. Après 64 ans de mariage, ils vont vivre séparés la nuit. Impossible de pouvoir obtenir qu’on les laisse dormir ensemble. Le rouleau compresseur de ceux qui passent leur temps en réunion et qui savent,des soi-disant médecins experts du tribunal des tutelles, n’ont même pas mentionner qu’il est très important de leur laisser vivre leur histoire d’amour. C’est un peu « tabou ». Cela n’existe pas. Cela dérange. Parce qu’ils sont vieux .On me dit’ mais ils dorment la nuit »! » votre père réveille votre mère » « il ne faut pas faire de sentimentalisme, voyons » ! Personne ne prend en compte qu’ils s’endorment en se donnant la main, qu’ils se réveillent avec des » je t’aime ». Évidemment qu’ils se réveillent l’un l’autre comme c’est le cas depuis 64 ans et comme c’est le cas dans tous les couples. La mariage c’est normalement ‘ jusqu’à ce que la mort nous sépare » . Alors qu’aujourd’hui nombreux sont ceux qui sont capables de descendre dans les rues pour empêcher l’union de ceux qui s’aiment, personne ne dit rien pour empêcher la désunion de deux personnes fragiles et dépendantes.
Ils quittent leur appartement à 14 heures aujourd’hui.
Je suis inquiète, surtout pour mon papa, car c’est sa femme son unique repère.
Je sais que la situation est exceptionnelle, car des couples encore vivant à 89 ans il y en a peu, car des couples atteint de la même maladie, il y en a peu, car des couples qui s’aiment très fort après 64 ans de mariage il y en a peu.
Je ne sais plus comment me battre. Si quelqu’un peut m’aider?